Les garçons et les filles de la résidence nous demandent des histoires aux fins heureuses qui font vibrer les cordes de leur cœur. Nous parlons d'histoires qui recréent des mondes magiques où l'on peut se mettre à l'abri de la solitude, des lieux où l'on aspire au bonheur. Beaucoup de ces garçons et filles vivent des réalités atroces qui traquent leurs désirs de bonheur, telles des bêtes affamées, les laissant sans enfance.
Je me souviens que ma mère était très en colère contre moi une nuit, tout mon corps tremblait, j’étais mort de peur, maintenant je ne perçois plus que des images floues, mais ce que je ressentais est toujours vivant. J'ai ce souvenir enregistré dans ma mémoire et peu importe mes efforts, je ne peux pas l'effacer, il apparaît sans autorisation, il veut me faire du mal et je crains qu'il soit près de moi pour toujours.
Un soir, à l'heure du coucher, un éducateur m'a demandé si je voulais que je lui raconte une histoire, j'ai dit oui et il m'a expliqué une histoire fantastique créée avec son imagination.
« …Dans la forêt, à quelques mètres de moi, un élan aux grandes ailes s'est approché et m'a demandé si j'étais l'élu. Ma surprise a été énorme, je lui ai dit que je venais sur ordre de la reine Esperanza, il m'a demandé de monter sur son dos et j'ai volé en m'accrochant à lui, j'ai vu passer des forêts, des plaines et des sommets, dans l'un d'eux je pouvais voir le palais royal et sa coupole, … "
Cette nuit-là, pendant que mon éducateur faisait voler son imagination en racontant des mondes imaginaires, j'ai fermé les yeux et j'ai rêvé de comment je volais avec mon élan et sauvais ma reine de son dragon et j'étais heureux.
Antonio Argüelles, Barcelone.
