
Conscience.
- Antonio Miradas del Alma

- 25 nov
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L'une des difficultés rencontrées par les éducateurs auprès d'enfants et d'adolescents vulnérables réside dans leur lutte pour se détacher de leurs rêveries. Vivre l'instant présent est un véritable défi ; le temps leur paraît interminable. Le libre arbitre, sous ses aspects, peut compromettre toute instruction ou tout plan. Il s'agit d'un présent tangible qui réclame d'être reconnu.
En fin de compte, le soignant se révèle, se faisant l'ambassadeur de leur être. De cette position, la confrontation et le malaise qu'il projette sont inévitables ; il est, par essence, porteur de ce qui est nié. C'est lui qui remet en question l'essence même de leur existence, démantelant les façades des vies désirées qui masquent des âmes tourmentées. C'est un travail délicat qui exige une loyauté sans faille, car la douleur est plus douce lorsque la sincérité jaillit du cœur.
L'enfer se manifeste lorsque la résistance, d'une manière ou d'une autre, surgit brutalement, mettant à l'épreuve la fragilité même de ces corps meurtris. Rien n'est fiable ni durable. L'essaim agité ne fait que présager un événement : le cri d'un désir étranger qui, par sa supplication de déni, s'insurge contre le mensonge. Un enfer où le céleste recueille les blessés par la reconnaissance et les honore de sa présence. Se sentir aimé est un premier pas vers l'honnêteté face à ce désir.
Pourtant, personne ne sait rien des corps tourmentés ; il n'existe que des indications et des arrangements qui relèvent davantage du rêve que de la réalité. Poser les fondations n'est pas le rôle des soignants, et pourtant on fait appel à eux ; les tempêtes de neige font s'écrouler les murs. Ce ne sont pas les fondations elles-mêmes, mais le soutien silencieux et pourtant tangible de leur présence, celle des éducateurs, qui soutient ces enfants dans une société qui les abandonne.
“J'aime être avec mon équipe, surtout après l'entraînement ; on parle comme des perroquets jusqu'à ce qu'on parte. Le samedi, les parents viennent toujours voir leurs enfants jouer. Je les accompagne toujours ; une famille ou une autre m'emmène au match. Je rêve désespérément d'être comme eux, de leur ressembler, d'avoir un père fier de son fils.
Mon père ne vient jamais aux matchs et ne s'occupe guère de moi. Je fais tout mon possible pour lui plaire, je suis très consciencieux, mais c'est peine perdue. Je gaspille mon énergie et, au final, je finis toujours par être détesté. Je reçois des réprimandes de mon père ; la dernière en date, il m'a rasé la tête. On dirait qu'il prend plaisir à me voir maltraité et humilié.
La résidence est le seul endroit où je peux me défouler. Je n'ai pas besoin de faire semblant d'être de l'équipe ni de me mentir à mon père. Je peux être moi-même, et ça fait mal. Je suis très peu patient dans un endroit comme celui-ci. Mes exigences sont irréalistes. Je veux guérir de cette épreuve et je réclame des solutions à voix haute à mes soignants.
Un après-midi de colère, je me suis débattue dans ma chambre, j'étais hors de contrôle, je voulais changer mon destin, un désir indigne d'une âme perdue. Un éducateur apparut devant moi, affirmant avoir quelque chose à me montrer. J'attendais des solutions, mais j'y trouvai bien mieux : une rencontre avec mon être profond. Il me raconta l'histoire de mon enfance, étape par étape, mes triomphes et mes échecs, jusqu'à aujourd'hui. Une perspective différente de la mienne.
À ce moment-là, j'ai compris que mon histoire est unique parmi les autres, que malgré sa différence, elle renferme un enfant qui, comme les autres, a aussi des désirs. Grâce à ce regard, le regard de mon éducateur, j'ai pu reconnaître mon père, les pères de mes amis et surtout, pour la première fois, j'ai pu me reconnaître moi-même.”
Antonio Argüelles, Barcelone.










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