
Silences.
- Antonio Miradas del Alma
- 1 jul
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Être éducateur et éducatrice dans un foyer pour enfants et adolescents reste une activité clandestine, en raison des connotations liées au travail avec le silence. Le silence protège la société de la tragédie et maintient les troubles confinés dans des espaces sûrs.
Les éducateurs et éducatrices qui s'engagent dans la dynamique du silence doivent s'armer : ce qu'ils voient est inconfortable, ne figure dans aucun manuel, et s'ils ne l'abordent pas avec tact, cela les détruit. La destruction ne survient que lorsque l'impuissance apparaît, que la réalité est annulée et que la perplexité vous assomme.
Ils commencent à comprendre comment les enfants et les adolescents qu'ils accompagnent perçoivent le temps comme une collection d'instants et de lieux vécus dans leur âme ; ils n'en connaissent ni le début ni la fin ; ils savent seulement qu'ils sont marqués par l'abandon.
Souffrir de l'abandon entraîne un vide émotionnel ; on perd une partie de soi et on cesse de s'aimer. C'est une marque qui ne guérit pas avec le temps, persistant impassiblement et immuablement comme l'éternité elle-même.
Dans ma résidence, l'abandon est fréquent chez les enfants. Notre foyer offre non seulement un refuge, mais aussi des moments où l'émotion et l'espoir s'épanouissent. Il n’est pas étonnant que nous entendions nos enfants réclamer avec enthousiasme qu’on prenne soin d’eux.
Un désir de retrouver du temps, de combler ces vides, d'être accompagnés par des savants de l'âme, des éducateurs et éducatrices sensibles, prêts à accueillir le deuil et à apporter du réconfort. Des professionnels qui, malgré leur fragilité, font preuve de proximité et de force. Un travail difficile qui entraîne de grandes pertes, car à chaque perte, la marque s'agrandit.
Dans ma résidence, les tragédies ont du mal à tenir. C'est comme un système électrique chaotique où chaque fil a sa place et son heure, mais on ne sait pas d'où il vient, et encore moins où il va. Notre mission est de veiller à ce qu'ils arrivent à destination en toute sécurité. Nous sommes spécialistes du câblage chaotique.
Être éducateur et éducatrice en moi résidence est un travail peu rentable ; l'électricité qu'ils réparent est à peine allumée ; cela prend du temps. Nous travaillons dans un système parallèle, dissocié et caché. Une ruine sociale, car l'immédiateté n'a jamais été un bon compagnon.
La fortune de ces éducateurs et éducatrices ne réside pas dans la reconnaissance, mais dans les expériences qui façonneront leur vie, à l'intérieur comme à l'extérieur de la résidence. Un trésor caché dans le silence qui, une fois ouvert, vous montre que votre vie a un sens.
Antonio Argüelles, Barcelone.
